Depuis la seconde moitié du 19ème siècle les publicitaires, financeurs de la presse, sont sensibles aux événements populaires qui attirent un public nombreux. Par conséquent, les journaux sportifs et régionaux rivalisent d’imagination pour attirer un plus grand lectorat comme en 1903, le journal « L’Auto » qui crée le Tour de France « la plus grande épreuve cycliste jamais organisée », événement populaire qui attirera les familles entières.
La décennie 1900-1910 fait régulièrement l’actualité avec les pionniers de l’aviation. Le lancement d’une montgolfière ou d’un dirigeable oblige de lâcher quelques instants avant le décollage des "ballons-pilotes", destinés à observer la direction des vents. Le rêve de voler étant dans l’air du temps, les directeurs de journaux trouvent dans les lâchers de ballons une animation populaire répondant à cet imaginaire.
Les concours de lâchers de ballons s’adressent aux enfants et sont organisés au cours des rencontres sportives et des foires-expositions. En juillet 1909, tandis que Louis Blériot traverse la Manche avec son avion, les lâchers de ballons sont organisés par centaine sur tout le territoire français mais la grande guerre interrompt cette dynamique.
À partir des années 1920, les animations reprennent avec des lâchers de ballons toujours aussi populaires car ils sont des moments participatifs et spectaculaires avec un nombre impressionnant de ballons multicolores s'envolant en même temps. Au fil des ans, il faudra trouver d’autres idées pour renouveler l’intérêt du public mais les lâchers de ballons, appelés aussi « Rallye-ballons », n’ont jamais complètement disparu au cours du 20ème siècle.
Depuis le début du 21ème siècle, leur pratique est « controversée du fait de la pollution importante et la mort directe d’animaux qui confondent les ballons avec leur nourriture. »
En janvier 1922, le quotidien breton « L’Ouest-Eclair » organise dans la ville de Rennes le « Cross des Cinq Provinces » à travers les rues de la ville et les prairies détrempées alentour. C’est pendant cette course qu’est proposé le concours de « ballons-cartes postales ». Pour cela, il faut se rendre dans les boutiques « Le Chat Noir », « Saint-Rémy » ou à la librairie du journal pour obtenir un ballon de baudruche. On peut aussi acheter une petite montgolfière, au prix de 5 francs, réputée plus résistante et susceptible de faire un voyage plus long.
« On sait que les ballons et montgolfières, qui auront été préalablement gonflés à nos frais, emporteront une carte postale affranchie que nous remettrons aux concurrents au moment du départ, et sur laquelle figureront le nom et l’adresse du propriétaire du ballon. Cette carte, mise à la poste par la personne qui aura trouvé l’engin, servira pour le classement. Un prix de 100 francs en espèces sera accordé au concurrent dont le ballon aura été le plus loin, mais il y aura aussi d’autres prix. Petits enfants, apprêtez-vous pour la fête de dimanche. »
Le 8 janvier, 229 coureurs se trouvent sur la ligne de départ, située « Champ-de-Mars ». Le lendemain, le journal rend compte des résultats sportifs mais ouvre une rubrique « Concours de ballons de l’Ouest-Eclair ».
Très rapidement, une première carte postale dont la montgolfière n’a fait que quelques kilomètres est apportée à la rédaction et les lecteurs peuvent suivre avec intérêt la progression des ballons. Des analyses sont même proposées à partir de trois cartes retrouvées dès le dimanche soir en Ille-et-Vilaine (Chateaubourg et Argentré-du-Plessis) et dans le département de la Sarthe (Sablé-sur-Sarthe). Cette dernière est « découverte à 17h20, soit 1h10 après son départ de Rennes. La distance entre Rennes et Sablé étant à vol d’oiseau d’environ 106 kilomètres, c’est donc à une vitesse voisine de 100 kilomètres à l’heure que nos petits ballons ont été emportés dimanche. Mais ce record de 106 kilomètres de trajet ne va-t-il pas être battu par un concurrent plus chanceux ? À cette question, la journée de demain nous apportera peut-être une réponse. »
Il faut attendre quelques jours pour apprendre que des ballons, après un voyage de 490 kilomètres, ont traversé le Veinazès !
Après l’expiration du jeu, le journal annonce le nom du gagnant : « À lui le beau billet de banque convoité par tant de jeunes compétiteurs ; mais que tous se consolent, les occasions ne manqueront pas dans l’avenir… […] Voilà terminé le Concours des p’tits ballons qui a fait la joie de tant de petits Rennais ! »
Quelques jours plus tard, le gagnant a même la chance de figurer en première page du journal !
Journal « L’Ouest-Eclair » www.retronews.fr
Wikipedia.